John Lennon avec nous |
Le 8 décembre 1980, John Lennon était tué à New York par Mark Chapman, un fan dont l’obsession de son idole va le conduire au crime passionnel de la frustration haineuse. Quelques jours après sa mort, En France, c’est Paris Match, l’hebdomadaire des familles qui consacre sa Une à cette légende de la musique, partie vraiment au mauvais moment. Les archive de Paris Match reviennent sur les fait qui laissent le monde, et pas seulement celui de la musique en pleine sidération. Alors que Les nécrologies s’enchainent dans la presse mondiale et la presse musicale, avec Paris Match, le poids des mots, le choc des photos, rappelez-vous, on revient sur les faits, oui, les faits de cet assassinat sans précédent. A l’instar d’un rapport policier qui relate cette journée pas comme les autres qui devait pourtant en être une. New York, 8 décembre 1980, il est bientôt 23h00. John Lennon et son épouse Yoko Ono rentrent chez eux après une séance d'enregistrement, un homme surgit devant leur immeuble et tire cinq balles en direction du chanteur. Gravement blessé, Lennon est transporté d'urgence à l'hôpital sur la banquette arrière d'une voiture de police. Mais il a perdu beaucoup de sang et "n'avait pas la moindre chance de survivre", explique un médecin. Le meurtrier, interpellé sur les lieux du crime, s'appelle Mark Chapman, il a 25 ans et il n’aurait pas pu résister aux "voix" qui l'auraient poussé au meurtre, selon ses dires. Quelques heures avant de passer à l'acte, ce même Mark Chapman s'était mêlé à d’autres fans juste devant le domicile de John Lennon, qui, comme il le faisait si souvent et peut-être un peu trop automatiquement, lui avait griffonné rapidement un autographe sur un exemplaire de "Double Fantasy", c’était son tout nouveau 33 tours. C’est avec cet album que Lennon à 40 ans revenait sur le devant de la scène, à nouveau sous les projecteurs, après plusieurs années de semi silence. C'est une "grande tragédie", c’est comme cela que réagit le président élu américain Ronald Reagan peu après l'annonce du décès, tandis que des milliers d'admirateurs ne tardent pas à affluer près de Central Park, devant le prestigieux "Dakota Building" où Lennon résidait avec Yoko Ono et leur fils Sean. A partir de ce jour, c’est Yoko Ono qui va gérer l’après mort de Lennon jusqu’à aujourd’hui ; l’affluence des fans autour du dakota building dans les moments qui suivent l’annonce de la mort de John, "Irritent par leur tumulte", la veuve qui prévient aussitôt, d’ailleurs qu'il n'y aura pas de funérailles publiques: elle ne veut pas de "cirque", c’est ce qu’explique alors David Geffen, le président de la nouvelle maison de « disques du couple » : oui, du couple car s’il y a ce retour en 1980 c’est parce que John et Yoko se sont retrouvés. Il était donc inscrit que la disparition de John laisse yoko ono aux commandes de l’immense héritage musical, intellectuel, moral et financier de Lennon et de son patrimoine. Yoko Ono, celle à qui s’adresse ce nouvel album, Double Fantasy, plus qu’à ses fans. la sortie de cet album sera un immense succès au goût amer, célébrant la jouissance du retour de l’amour, Lennon est coupé dans son élan créateur, dans sa vie ? sapé par l’horrible hasard d’un fait divers, le fait d’un psychopathe, un jour comme un autre. Insupportable. Reviennent alors les images de ce jeune anglais aussi peu assuré qu’arrogeant, mâchant son chewing-gum qui fait scandale de sa voix nasillarde à l’accent scouse de Liverpool en comparant la popularité des Beatles à celle de Jésus en conférence de presse. Toujours le même Lennon brisant le pacte des Beatles pour se libérer et vivre avec Yoko Ono sa musique comme un idéal politique, aussi superficiel pour certains qu’authentique pour d’autres comme quand il apparait en tête de marches pour les droits civiques ou dans des manifestations contre la guerre du Vietnam, lui l’anglais, voulant devenir américain dans les années 70. Alors qu’il est en pleine composition d’ « Imagine » chez lui, « Imagine » l’ultra célèbre ballade romantique dont on a voulu faire un hymne idéaliste sur la beauté et la nécessité de rêver le monde, il met dehors des fans qui ont pénétré sa propriété et leur conseille d’aller vivre leur vie. Il n’est pas un modèle et n’aspire pas à l’être. Mais qu’ont-ils tous vu chez Lennon ou voulu voir, un prophète, un sage, un leader politique ? 40 ans après sa mort, on retient l’œuvre magistrale de cet auteur-compositeur et chanteur de génie.
Mais Sa mort, dans le monde, consacre d’abord l’homme, il reçoit des adieux hors du commun. Le 14 décembre, entre cent et deux cent mille personnes bravent le froid à Central Park, à deux pas de la scène du crime, pour lui rendre hommage. La municipalité fait diffuser du Beethoven et "des chansons tendres des Beatles, avec Lennon en vedette". A Miami, Los Angeles, Chicago, Seattle ou encore Boston, des dizaines de milliers d'admirateurs se réunissent "dans des parcs, sur des places, dans des parkings ou amphithéâtres naturels des Red Rocks, au coeur des Rocheuses, où les Beatles avaient donné un concert en 1964. Des hommages pleuvent jusqu'à Moscou, où la police soviétique devra intervenir quelques jours plus tard pour disperser plusieurs centaines de jeunes gens rassemblés près de l'université, brandissant des portraits de Lennon. On sait que l’URSS n'avait pas, bien sûr, échappé à la déferlante du groupe pop le plus connu du monde, les Beatles dont les enregistrements importés se négociaient au marché, la porte d’entrée musicale par laquelle on faisait entendre le son du monde occidental aux jeunes russes. Au Royaume-Uni, l'émotion est brulante. En particulier à Liverpool, la ville natale du chanteur, où "quelque 20.000 personnes ont entonné en choeur 'Give Peace a Chance'", à la fin d'un concert organisé en sa mémoire ce même 14 décembre. Aujourd’hui encore, et 40 ans après sa disparition, ce Give peace a chance, War is Over » fait office d’intemporel chant de Noël séculier. Comme au temps de la Beatlemania, des fans pleurent et s'évanouissent, certains vont jusqu’au suicide tandis que l'ancien impresario du groupe lance à la foule endeuillée une forme de vœu qui paraît depuis la mort d’autres légendes un peu stéréotypé: "John Lennon n'est pas mort. Tant que sa musique vivra, il ne pourra mourir". De quel grand compositeur ne pourrait-on pas dire ça ?
Lennon Lennon est l'autre grande voix des Beatles, et McCartney est l’autre grande voix des Beatles, comme on veut, ça marche dans les deux sens, mais Lennon, c’est aussi le rebelle dans ses propres chansons militantes après les Beatles. Il met son romantisme déchirant à l’épreuve de son engagement dans des ballades extraordinaires, ou son émotion s’affirme. Un artiste culte par sa musique par son charisme, par l’héritage musical qu’il laisse. Normal, depuis le début , on dit et il le pense, "Il a vraiment tout du chef" Il est meneur quand il forme les Beatles, plus rock que pop, normal encore, la pop ils sont en train de l’inventer à partir de leur amour du blues et du Rock’n’Roll, mais il est en complémentaire harmonie avec Paul McCartney plus discret et plus sérieux, John Lennon restera, lui, très provocateur et iconoclaste tout au long de sa carrière. "C'est une grande gueule, il a vraiment tout du chef, insistera Stan Cuesta, chroniqueur musical et auteur du livre The Beatles. Mais au fur et à mesure que les Beatles avancent dans leur œuvre jusqu’à l’apogée expérimentale qu’on connait, le plus grand groupe du monde appartient de plus en plus à McCartney qui prend une part immense dans le schéma musical du groupe même si, jusqu’à la fin, on n’imaginera jamais l’un sans l’autre. En dépit de l’objectif partage de talents qui, seul, sublime la musique des Beatles, dans leur petite histoire, John Lennon se considèrera toujours comme LE leader du groupe."
Lennon est une mémoire vivante par l’identification de milliers de musiciens et song-writers qu’il va inspirer. Mais chacun véhicule sa propre mémoire dans la tragédie lennonienne. Pacifiste engagé, on en fera un martyr de la cause, on le fera porteur des valeurs de paix dans le monde. Pour ses prises de positions, il sera plusieurs fois ennuyé par les services américains et surveillé dans ses agissements publics. Quoi qu’il en soit, la légende de Lennon se forge surtout à la force de ses compositions et de l’émotion indélébile gravée sur ses quelques albums solos de rupture et de grâce, de déchirements, trépidations et de tendresse. Musical Working Class Hero. Il redevient, après la période de gloire absolue des Beatles et la fin précipitée des 4 garçons dans le vent, le chantre de la mémoire de la décennie des années 60, voire des années 50 qu’il prolonge dans des productions au sonorités brutes des années 70. Il a rêvé d’être Elvis, il est John Lennon : toujours avec la même ardeur qui l’habite depuis ses débuts, son imaginaire valsant entre ironie et douceur, entre Rock’n’Roll, Jam et folk, au côté de Yoko Ono, omniprésente, qu’il imposera à tous ses inconditionnels comme un inconditionnel au monde entier. Il est la première Rock star disparue, après l’éternel Elvis Presley pour qui on bâtira autant de Mémoriaux. Depuis le milieu des années 1980, un mur de la ville de Prague continue d'être couvert de graffitis en son hommage, c’est le mur Lennon. Un astéroïde découvert en 1983 est baptisé (4147) Lennon en son honneur. En 1985, Quoi de plus logique, un mémorial Strawberry Fields est inauguré au Central Park de New York. Il est le théâtre de rassemblements réguliers et de dévotion à proximité du Dakota Building. Cuba a célébré Lennon avec Le parc public John Lennon. Sur l'un des bancs du parc, une statue de l’homme ; celle-ci fut inaugurée le 8 décembre 2000 par Fidel Castrolui-même. Une inscription près des pieds du banc est un extrait des paroles d’imagine : « Tu peux dire que je suis un rêveur, mais je ne suis pas le seul ». Voilà ce qu’on aime retrouver chez Lennon. Car depuis sa mort, comme pour toute célébrité, l’homme a remplacé le rêveur, sa vie a été explorée, sa psyché analysée, on est revenu sur des mythes, on a construit des complots mais celui qui inspire des mythes, est l’auteur du mythe lui-même. En 2002, c’est l'aéroport de Liverpool, qui est rebaptisé John Lennon Liverpool Airportet une autre statue trône dans le hall d'enregistrement, tandis que la devise « above us only sky » tirée des paroles d'Imagine, encore Imagine, est peinte au plafond. Lennon aurait pu dire que l’empreinte d’Imagine est inaliénable, parce que le rêve est infini. Lennon n’a jamais donné de conseils, ni de leçons de morale, il a invité au rêve, c’est toute la différence et parfois même la cause d’un certain malentendu sur sa personnalité et ses ambitions. Des expositions lui ont aussi été consacrées, dont « John Lennon Unfinished Music », en 2006 à la Cité de la musique en France et « Imagine, la ballade pour la paix de John & Yoko, » une exposition temporaire au Musée des beaux-arts de Montréal, en 2009. En 2007, c’est sur l'île Viðey dans la capitale islandaise Reykjavik, qu’a été inaugurée carrément une tour, la « Tour Imagine Peace, » un monument conçu par sa veuve Yoko Ono, toujours elle. Plus qu’une héritière de la mémoire de Lennon, elle est l’éminence blanche ou noire qui entoure Lennon d’un art vivant. Le 12 août 2012, c’est encore Imagine qui a illustré l’hommage qui a été rendu à John Lennon lors de la cérémonie de clôture des Jeux olympiques de Londres, chanson emblématique s’il en est « Imagine » passée par tous les registres, est l’arbre qui cache le pays magique de l’œuvre musicale de Lennon qui nous émerveille encore, Heureusement, tous ces mémoriaux ne pourront jamais pas nous faire tomber dans la facilité des honneurs glorificateurs au risque d’éculer la signature musicale hors du commun de ce génie musical. |
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